Henri Fayol

14 principes pour une bonne gestion

Texte
Dernière mise à jour : Janvier 2009
HOME  Portails : 5S   Production Lean Entreprise Maintenance Management Qualité Stratégie AUTEUR

Petit condensé pour lecteurs pressés

Henri FAYOL (1841-1925) est un des précurseurs français du management. Ses principes relatifs à l’organisation, l’administration et gestion ont connu le succès aux Etats-Unis. FAYOL a été " réimporté " en France après la seconde guerre mondiale, par les consultants américains, profitant de l’engouement pour le modèle américain.

Le mérite de FAYOL a été de dégager de son expérience des principes simples, devant favoriser l'efficience dans les entreprises grâce à la définition du rôle de chacun. Avant lui, les fonctions classiques production, approvisionnement, commerciale, finances étaient déjà définies. Il y ajoute la fonction " administrative " sur laquelle il focalise son attention.

Alors que les fonctions " classiques " mettent en jeu la matière et les machines, la fonction administrative n'agit que sur le personnel. Faite de tact et d'expérience, la mesure est pour FAYOL l'une des principales qualités de l'administrateur.

Après avoir obtenu de gros succès dans la réorganisation et l'expansion son affaire, il condense ses idées de chef d'entreprise dans Administration industrielle et générale, ouvrage fréquemment réédité et qui connu le succès surtout aux États-Unis.


Henri FAYOL

L'homme et sa carrière

Ingénieur de l’école des mines de St Etienne, fait toute sa carrière à la Société industrielle et minière de Commentry-Fourchambault. Quand il y entre, c'est une société au bord de la faillite. Il contribue à la relever et en devient Directeur général en 1888, il reste à sa tête jusqu'en 1918.

FAYOL constate que comparativement à la technologie, la gestion, la comptabilité et la gestion administrative n’ont pas connu de progrès significatifs, que ces matières ne sont pas enseignées dans les écoles d’ingénieurs, alors qu’il estime que l'apprentissage scolaire de l'administration est une nécessité. Il estime que cette carence tient à l'insuffisante formalisation du sujet et c'est ce qui va le conduire à entreprendre ses travaux dans le domaine administratif.

Fayol commencera par recenser les principales fonctions dans l'entreprise, qu'il regroupera en six catégories :

  • la fonction technique de production et de transformation
  • la fonction commerciale qui comprend l'achat, la vente et l'échange
  • la fonction financière : recherche et gestion des capitaux
  • la fonction de sécurité s'appliquant aux biens et aux personnes
  • la fonction comptable
  • la fonction administrative qui recouvre les tâches de direction.

C'est cette dernière qui constitue l'objet principal de ses travaux.

Les dirigeants ne se sont jusqu’alors préoccupés que de commander et de contrôler.
FAYOL souligne 3 autres tâches importantes du dirigeant : prévoir, organiser, coordonner.

    Le commandement assure la bonne marche de l'organisation et la direction des hommes y tient une place essentielle. C'est une activité qui repose à la fois sur la personnalité du dirigeant et sur sa connaissance de l'administration de l'entreprise.

    Le contrôle consiste à vérifier l'application du programme d'action, des procédures et des ordres. Inséparable des sanctions, il fait l'objet lui-même de procédures rigoureuses.

    La prévision doit permettre de préparer l'avenir en établissant un programme à la fois souple pour rester adaptable aux variations et suffisamment précis pour servir de base commune, et éviter toute confusion, aux différents acteurs. C’est une tâche qui fait appel à la créativité autant qu’au calcul.

    L'organisation consiste à munir l'entreprise des organes nécessaires à son fonctionnement, à définir leurs fonctions, leurs responsabilités, établir des procédures.

    La coordination vise à relier, unir et harmoniser les efforts de tous, principalement au travers de conférences hebdomadaires. Certains cadres de direction sont invités à y participer.

Selon FAYOL toutes ces tâches sont présentes dans toutes les activités de l'entreprise, mais selon le poste, leur importance respective varie ;

Pour un ouvrier, l'activité technique représente 85 % du total et les activités de sécurité, de comptabilité et administratives se partagent le reste. Pour un directeur général, les activités administratives recouvrent 50 % de son temps, chacune des autres en représentant 10 %. Dès lors que ces activités peuvent être analysées pour chaque poste dans l'entreprise, il devient aussi possible d'organiser en conséquence la formation des hommes en vue d'optimiser leurs performances.

Pour que la fonction administrative soit correctement remplie, Fayol (1916) estime qu'elle doit s'appuyer sur des principes, expression qui correspond pour lui à une idée de souplesse.


14 principes pour une bonne gestion

(Notez que le nombre de principes varie légèrement d’un exégète à l’autre)

Je vous en propose la lecture, en tentant la transposition dans le management du 21è siècle.

1. La division du travail.

Elle a pour but d'arriver à produire plus et mieux avec le même effort. Elle permet de réduire le nombre d'objets sur lesquels l'attention et l'effort doivent se porter. Elle ne s'applique pas seulement aux besognes techniques mais à tous les travaux qui mettent en jeu un plus ou moins grand nombre de personnes. Elle a pour conséquence la spécialisation des fonctions. Mais elle a ses limites que l'expérience, accompagnée de l'esprit de mesure, apprend à ne pas franchir.

    Toujours vrai pour l'essentiel, avec deux nouveautés cependant :

  • la segmentation trop poussée des tâches répétitives enlève tout intérêt au travail. Il y a une tendance inverse, qui prône à l'enrichissement des tâches.
  • le management actuel encourage dans certains domaines l'apparition de fonctions transversales, pour lesquelles la notion d'hiérarchie s'estompe au profit du rôle opérationnel.

2. L'autorité.

" C'est le droit de commander et le pouvoir de se faire obéir "

Pour faire un bon chef, l'autorité personnelle (faite d'intelligence, de savoir, d'expérience, de valeur morale, de don de commandement) est le complément indispensable de l'autorité statutaire, attribuée par la fonction. Elle est inséparable de sa contrepartie qui est la responsabilité, incluant la sanction.

    A l'époque de Fayol, la hiérarchie statutaire allait de soi, de nos jours les choses ne sont plus forcément ainsi; les rôles hiérarchiques cèdent souvent la place à des rôles d'animation. Néanmoins, l'autorité personnelle (le charisme ?) reste bien fait des qualités citées.


3. La discipline.

"L'esprit public est profondément convaincu que la discipline est absolument nécessaire à la bonne marche des affaires et qu'aucune entreprise ne saurait prospérer sans discipline."

" C'est essentiellement l'obéissance, l'assiduité, l'activité, la tenue, les signes extérieurs de respect réalisés conformément aux conventions établies entre l'entreprise et ses agents"

    La notion de discipline au quotidien ne semble plus aussi rigide, quoique la rédaction des règlements intérieurs s'inspire toujours de ce principe.

Et Fayol d'ajouter: " Lorsqu'un défaut de discipline se manifeste ou lorsque l'entente entre chefs et subordonnés laisse à désirer, il ne faut point se borner à en rejeter négligemment la responsabilité sur le mauvais état de la troupe; la plupart du temps, le mal résulte de l'incapacité des chefs."

4. Unité de commandement.

Pour une action quelconque, "Un agent ne doit recevoir des ordres que d'un seul chef." Tout manquement à ce principe conduit selon FAYOL, à un dépérissement de l'organisation.

    Il est évident qu'il n'y a rien de plus facile que de renvoyer deux autorités dos à dos et d'exploiter la situation s'il n'y a pas unité de commandement. Personnellement je me force à toujours passer par la hiérarchie intermédiaire et ne pas donner directement d'ordres aux exécutants. Si l'urgence ou les circonstances commandent autrement, il faut absolument informer rapidement la hiérarchie intermédiaire des consignes données.

5. L'unité de direction

" Un seul chef et un seul programme pour un ensemble d'opérations visant un même but. "

    Complété par cette maxime : donner à tout le monde, c'est donner à personne. Pour une meilleure efficience et éviter des compétitions internes contre-productives, ce principe a même force de loi !


6. Subordination de l'intérêt particulier à l'intérêt général.

A laquelle on doit être très attentif car toutes sortes de causes tendent à l'atténuer; ignorance, ambitions, égoïsme, paresse, faiblesses, bref, toutes les passions humaines tendent à faire perdre de vue l'intérêt général en privilégiant le particulier.

    En complément de lecture, mi-sérieuse, mi-loufoque, je recommande "L'antimanagement, du système D à la théorie L" de Jean-Paul Sallenave, Editions d'organisation,1993, où l'auteur développe toute une théorie fondée sur "moi d'abord !"

7. Rémunération du personnel.

Elle est le prix du service rendu.
Elle " doit être équitable et, autant que possible, donner satisfaction à la fois au personnel et à l'entreprise, à l'employeur et à l'employé "

    Thème éternel et consensus probablement impossible...

8. Centralisation

" La question de centralisation ou de décentralisation est une simple question de mesure. Il s'agit de trouver la limite favorable à l'entreprise... Le but à poursuivre est la meilleure utilisation possible des facultés de tout le personnel. "

    Remplacez "décentralisation" par "délégation" et relisez.

9. La hiérarchie

" La série des chefs qui va de l'autorité supérieure aux agents inférieurs". Le commandement en fait la voie de communication nécessaire cependant il faut veiller à éviter une transmission trop longue.

    Avec la tendance à l'aplatissement des pyramides hiérarchiques et la réduction des postes hiérarchiques, cette ligne de transmission se raccourcie naturellement. La technologie court-circuite également tous les canaux traditionnels, dans le cas des réseaux, des Intranets...


10. L'ordre

Il est à la fois matériel, exprimé par la maxime " une place pour chaque chose et chaque chose à sa place " et social avec cette adaptation ; une place pour chaque personne et chaque personne à sa place.

L’ordre dépend de deux conditions: une bonne organisation et un bon recrutement. En oubliant cette simple règle de bon sens, on en arrive à des situations difficiles à rétablir du fait qu'un certain seuil de désordre a été franchi.

    Je suppose que Fayol incluait "promotion" dans la notion de recrutement. On ne présente plus le très fameux "principe de Peter" comme illustration du chaos résultant d'une promotion au-delà du seuil de compétence.

11. L'équité

La justice s'apprécie en fonction de règles établies, alors que l'équité va plus loin ; elle est faite des interprétations nécessaires de ces règles, forcément incomplètes. " elle demande, dans l'application, beaucoup de bon sens, beaucoup d'expérience et beaucoup de bonté "

    C'est probablement dans ce principe que transparaît avec le plus d'évidence la tendance au paternalisme de son auteur.

12. La stabilité du personnel

Elle conditionne l'efficacité d'une formation qui est généralement longue: " il faut beaucoup de temps, en effet, pour faire connaissance avec les hommes et les choses d'une grande entreprise, pour être en mesure de décider un programme d'action, pour prendre confiance en soi et inspirer confiance aux autres. Aussi a-t-on constaté souvent qu'un chef de moyenne capacité qui dure est infiniment préférable à des chefs de haute capacité qui ne font que passer."

    Ce principe me parait énigmatique; pourquoi le limiter aux "chefs" ? La rotation du personnel touchait-elle davantage cette catégorie en son temps ? Ou la sensibilité à la rotation des autres catégories était-elle plus faible que de nos jours ?
    Par ailleurs, la stabilité inclut-elle la limitation des promotions ? J'y vois un complément au principe d'ordre.
    Votre avis est bienvenu; mail


13. L'initiative

C'est la liberté de proposer et d'exécuter. Elle contribue au développement d'une dynamique car " à tous les niveaux de l'échelle sociale, le zèle et l'activité des agents sont accrus par l'initiative. L'initiative de tous, venant s'ajouter à celle du chef et, au besoin, la suppléer, est une grande force pour les entreprises."

    Extraordinairement d'actualité; management participatif, job enrichment, système de suggestion... L'humilité de Fayol lui a fait reconnaître les potentiels de tous les employés, mêmes modestes.

14. L'union du personnel

S'il convient de diviser les forces de l'adversaire pour s'assurer la victoire, il faut à l'inverse favoriser l'union du personnel, l'harmonie des relations. Pour Fayol, l'abus de communication écrite serait une source de conflits (et de coûts) et il faut donc en limiter l'usage.

    Rédigé dans un style quasi militaire, il laisse transparaître l'autre modèle probable de l'auteur. Le paternalisme bienveillant tempérant le tranchant militaire.


Fayol et Taylor

Il est fréquemment fait des parallèles entre Taylor et Fayol et, de fait, Henri Fayol apporte dans le domaine administratif une contribution tout à fait comparable à celle que Taylor propose pour l'activité de production.

  • Taylor s’intéresse à l’univers productif, il en a une vue " microscopique ", il veut tout quantifier et codifier avec une démarche rationnelle et scientifique, il cherche le " one best way ", il est déterministe.

  • Fayol a une vision " macroscopique ", il prend du recul et observe l’entreprise dans son ensemble. Pragmatique, il recommande la souplesse, la mesure, l’adaptabilité permanente.

  • Fayol reconnaît l’apport des qualités intrinsèques de l’individu à sa tâche, alors que Taylor essaie de rendre le travail indépendant de tout savoir-faire ou aptitude particulière.

  • Fayol privilégie fréquemment l'expérience et surtout la mesure. C'est l'un des aspects caractéristiques de sa " modernité " car bien qu’il s'inscrive dans le courant général des spécialistes de la gestion scientifique des entreprises, à la différence de Taylor, son approche n'est concevable que de façon souple, pragmatique.

Les idées de Fayol sont tellement " actuelles " qu’en préparant ce texte, j’ai du vérifier plusieurs fois qu’il était bien contemporain de Taylor.


Fayol aujourd'hui

  • Il a reconnu la ressource humaine comme telle, avant que les théoriciens tels que Mayo la révèleront vingt ans plus tard. En ce début de millénaire, où la gestion de la ressource humaine est plus d'actualité que jamais, les principes de Fayol gardent toute leur fraîcheur.

  • La mesure recommandée par Fayol est une clef du management toujours utilisable; elle garde l'adaptabilité du décideur, la flexibilité de l'organisation. Pas de dogmatisme, pas de rigidité sclérosante, mais la conservation d'une capacité de jugement et d'adaptation aux circonstances.
    Or, dans notre contexte de plus en plus instable, cette qualité est fondamentale, peut être déterminante pour la survie de l'entreprise.

  • Enfin, dans " Le management ", Michel Weill pose cette question  à propos de l’enseignement des sciences de gestion :

      " Peut-être convient-il d'observer qu'avec un siècle de décalage, les progrès accomplis restent limités et les écoles d'ingénieurs, comme les facultés de sciences et techniques maintiennent une prudente réserve à l'égard de domaines vers lesquels un nombre toujours élevé de leurs diplômés se dirigeront pourtant un jour ou l'autre. "


    Bibliographie

  • Le management, la pensée, les concepts, les faits, Michel Weill, Edition Armand Colin, 1994
  • Précis d'organisation et de gestion de la production, Boyer, Poirée et Salin, Editions d'organisation 1988 Hit-Parade
  • Sommaire

  • Petit condensé pour lecteurs pressés
  • Pourquoi présenter Fayol ?
  • L'homme et sa carrière
  • 14 principes pour une bonne gestion
  • Fayol et Taylor
  • Fayol aujourd'hui
  • bibliographie
  •  

    Pourquoi présenter Fayol ?

    Outre l'exemple que toutes les contributions au Management ne viennent pas des Etats-Unis ou du Japon, Fayol a eu la sagesse de ne pas édicter de règles, mais de proposer des principes, des lignes directrices. Celles-ci sont toujours actuelles et peuvent servir à une réflexion sur les rôles du manager d'aujourd'hui.

     

    L'auteur, Christian HOHMANN, est directeur associé au sein d'un cabinet spécialisé.

    Ses équipes interviennent sur des problématiques de performance industrielle et logistique.

    Contact commercial


    Cette page vous est offerte par ©hristian HOHMANN -  http://chohmann.free.fr/