Le système TOYOTA

Texte
Dernière mise à jour : Avril 2013
HOME  Portails : 5S   Lean Entreprise Maintenance Management Qualité Stratégie AUTEUR Page 3/5 

Process et opérations

Le Toyota Production System (TPS) distingue Process et opérations;

  • Processus (Process): suite de transformations de matière en produit faisant intervenir le temps et l'espace, c'est le flux matière.
  • Opérations : étapes dans le processus faisant appel aux hommes et/ou machines, c'est le "flux travail".

Rappelons que seule la transformation (et une partie du contrôle) génère de la Valeur Ajoutée, le reste n'étant que des pertes, souvent considérées comme des "maux nécessaires".

Accepter l'idée de "mal nécessaire" est une capitulation qui bloque tout progrès. Oser remettre en question ce que la routine, les traditions ont pérennisé est souvent source de gains importants et souvent "gratuits".
Voir Kaizen

Les pertes étant des bénéfices potentiels, l'amélioration du processus vise non pas l'amélioration des opérations sans valeur ajoutée, mais leur anéantissement !

Cette remarque, frappée du bon sens, ainsi que la distinction entre les différentes opérations dans un process sont fondamentales pour la compréhension du TPS et la conduite de l'amélioration.

Pour cette raison il est important de distinguer l'analyse du processus de l'analyse des opérations.


Sept types de gaspillage

[OHN90] "Pour parvenir à l'élimination complète des gaspillages, il est important de garder à l'esprit les deux remarques suivantes :

  1. Accroître l'efficacité n'a de sens que si cela permet une réduction des coûts. La direction à suivre est de ne fabriquer que les produits dont on a besoin avec le minimum de main-d'oeuvre.

  2. Il faut rechercher l'efficacité de chacun des opérateurs, sur chacune des lignes de production, ensuite celle des opérateurs en tant que groupe et, enfin, celle de l'ensemble des lignes, c'est-à-dire de la totalité de l'usine. Il faut viser l'efficacité des parties mais aussi celle du tout."

Voir aussi Muri Mura Muda

1. Gaspillages provenant de la surproduction

Dans le Japon de 1945, toute matière ou ressource (si précieuse) mal affectée (à une production non vendue), risquait de conduire à un stockage, c'est à dire à un revenu différé et amoindri. Mortel !

Le schéma se reproduisit à une moindre échelle en 1973 lors du choc pétrolier et les décennies suivantes. Sans oublier les systèmes de quotas, imposés dans certains pays européens, qui limitèrent la capacité du marché pour les constructeurs japonais.

Maximiser les ventes c'était vendre ce que les différents clients voulaient effectivement, laisser tirer les ventes par le marché. La généralisation de cette idée au système de production aboutira au système Kanban.

Après que les pénuries de l'après-guerre s'étaient résorbées, proposer un éventail de modèles important et ne produire que ce qui commandé reste un argument de vente. Tout un système de recueil d'informations auprès de sa clientèle permet à la marque d'ajuster sa production "au plus juste". Voir [WOM92] et [OHN92]

La conservation de ce principe est aussi un moyen de conserver des marges de progrès dans des marchés en contraction, car il est facile d'améliorer la productivité en augmentant les quantités produites, mais il est difficile de le faire dans un contexte de diminution des volumes de production.

Eliminer les surproductions, c'est porter une grande attention à la planification mais aussi accepter de ne pas chercher le plein emploi des ressources. Cette notion est très importante et je vous invite à lire à ce sujet la théorie des contraintes.


2. Gaspillages provenant des temps d'attente

Une ressource inoccupée n'est pas forcément un gaspillage, car il convient de distinguer le plein emploi de l'activation d'une ressource. (Cf Théorie des contraintes)

Les pièces en attente sont assimilables à des stocks (voir plus loin).

Le manque d'occupation ponctuel de la main d'oeuvre, provenant d'un manque d'équilibrage ou des aléas affectant le flux de production est minimisé par la proximité des postes, les opérateurs étant autorisés à se porter mutuellement assistance.

Les attentes intolérables sont les arrêts dus à des défaillances d'équipements ou aux changements de séries.

Les premières sont combattues à l'aide de la Maintenance Productive Totale (TPM), à l'automaintenance… Les secondes sont progressivement éliminées à l'aide de méthodes de changement rapide d'outils, le SMED.


3. Gaspillages occasionnés par les transports

Le transport d'une pièce d'une machine à l'autre ne lui confère aucune valeur ajoutée. Disposer les différentes machines en flow-shop, c'est à dire selon la logique des opérations à effectuer sur la pièce, plutôt qu'en job-shop c'est à dire en ateliers spécialisés, est un bon moyen de réduire la logistique interne.

Dans le flow-shop on dispose toutes les ressources nécessaires à l'accomplissement des diverses opérations de manière à ce que le flux de production s'écoule sans turbulences. Par exemple un tour, une perceuse, un poste de finition…

Le job-shop ou atelier spécialisé regroupe des ressources d'un même type; atelier de tournage, unité de perçage, atelier fraisage, etc.

Effectuer les différentes opérations sur une même pièce oblige à d'incessants transports et attentes entre les ateliers.

Il est généralement admis par tous les industriels que la disposition des ressources en ateliers spécialisés conduit à un véritable cauchemar logistique; les pièces parcourant des circuits en "plats de spaghettis" et restant une bonne partie du temps à attendre dans les interstocks.

Placer les différentes ressources très près les unes des autres réduit les besoins de transport, et interdit physiquement de gros interstocks.

Le transport étant identifié comme un gaspillage à éliminer, les moyens de transitique sophistiqués sont un double non-sens ;

Non seulement ils ne suppriment pas le transport, mais le rende plus "efficace" !

Or quel intérêt à investir dans une technologie complexe améliorant le gaspillage ?

Seulement après avoir vérifié que le transport ne peut être éliminé, ni réduit davantage, on pourra chercher à l'améliorer.

Ce genre de nuance vaut pour les liaisons automatisées entre machines; Si l'on peut éliminer la main d'œuvre par l'automatisation il est préférable de le faire, car cet équipement finira par ne plus "rien coûter", alors que l'humain nécessite un investissement perpétuel.

Le transport de pièces dans l'industrie électronique

Si l'on excepte les process très automatisés, la tendance observée dans l'industrie électronique japonaise est tout à fait significative ;

Les opérations manuelles ont hérité de l'époque de la fabrication des machines bureautiques et téléviseurs lourds et encombrants, des lignes-transfert sophistiquées. La généralisation des ces lignes se fit même pour des pièces peu encombrantes et légères.

L'extrême segmentation des tâches issue de la production de masse, réduisit le temps de cycle par poste à un niveau tel que la préhension et repose des pièces sur la ligne deviennent non négligeables par rapport à l'opération elle-même.

Avec la fin des productions de masse, au profit de plus grandes variétés de produits, la recherche de la flexibilité impose une refonte du système de production.

Préhension et repose sont de pures pertes, un gaspillage à éliminer.

Progressivement les lignes-transfert sont abandonnées, des établis bon marché sont placés en "cellules", côte à côte, et les transferts se font de main à la main, entre opératrices.

Les gains de place, d'efficacité sont souvent spectaculaires, les frais de maintenance des lignes sophistiquées éliminés.


4. Gaspillages dus aux stocks inutiles

La définition des stocks doit être comprise au sens large; des pièces en attentes sont un stock, des pièces en cours d'acheminement sont un stock, en mouvement peut-être, mais stock quand même.

La distinction entre lot de transfert et lot de production conduit au principe même du flux tendu. Elle constitue certainement le meilleur révélateur et moyen d'anéantissement des stocks masqués.

La limitation de l'espace disponible empêche le stockage. La disposition des différentes ressources en flow-shop permet de réduire considérablement les besoins en transport et n'autorise pas ou peu de stockage. Idéalement, on essaie de placer les ressources en prise directe les unes avec les autres et on cherche à travailler avec des lots de transfert de taille 1.

Les stockeurs automatiques présentent les mêmes caractéristiques que les moyens transitiques ; ils améliorent (?) l'opération de stockage elle-même, mais ne la suppriment pas.

L'objectif est l'anéantissement des gaspillages dus aux stocks inutiles, ce qui suppose l'existence de stocks "utiles". Ceux-ci existent bel et bien et sont même vitaux, chercher le zéro stocks est une absurdité.

Voir notion de Buffer TOC


5. Gaspillages dans les processus de fabrication

Il est difficilement croyable que dans des processus de fabrication, il puisse exister des usinages inutiles, des opérations superflues. Pourtant, la routine, la "tradition" du métier laisse des opérations dans les gammes que les évolutions technologiques ou le produit lui-même ne requiert pas ou plus.

Une analyse critique de chaque opération peut débusquer ce genre de gaspillage.

Le service méthodes s'attachera à l'analyse du processus, le développement de l'analyse produit.
La technique d'analyse de la valeur peut être d'une bonne aide.

6. Mouvements inutiles

La notion de mouvements inutiles est bien connue de tous les méthodistes. Les mouvements inutiles les plus évidents sont en général éliminés facilement. Plus difficiles à traquer sont les (mauvaises) habitudes que les exécutants développent spontanément. Celles-ci peuvent très bien échapper à l'observation, soit parce que ces gestes cessent à l'arrivée d'un observateur, soit parce que ce dernier se laisse abuser par l'aisance des exécutants. Je suis moi-même toujours surpris de l'efficacité avec laquelle les opératrices arrivent à exécuter des gestes compliqués et peu naturels.

Dans les mouvements inutiles, il faut inclure les allées et venues inutiles. Ergonomie des postes, aménagement des ateliers, approvisionnements… autant de pistes à explorer.


7. Gaspillages dus aux pièces défectueuses

L'abondante littérature relative à la gestion de la qualité et la diffusion de l'esprit qualité dans les entreprises ont sensibilisé aux coûts de la non-qualité.

Ce coût dépasse celui de la pièce en défaut, de son retraitement ou remplacement, car avec des flux tendus, l'incidence de la non-qualité se propage en aval ; retards, manquants, perte d'opportunité, etc.

CAPACITE = TRAVAIL + GASPILLAGE

Dans le TPS, l'important est de supprimer la cause de non-qualité, et pas de traiter les symptômes. 


Page précédente

 

Lire la Suite

                       

L'auteur, Christian HOHMANN, est directeur au sein d'un cabinet conseil.

Après 12 ans de pratique opérationnelle des méthodes japonaises auprès de YAMAHA, il mit son expérience au service de ses clients en interventions de conseil et accompagnement sur des problématiques de performance opérationnelle.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

 

Le "système TOYOTA" est souvent assimilé à la seule méthode kanban.  

 

 

 

 

 

 

 

 

poka-yoke

Le Poka-Yoké est un détrompeur, un système anti-erreur.

Pour en savoir plus :

 

 

 

Tout processus peut se décrire à l'aide de 4 actions de base :

  1. Transformation (usinage, assemblage)
  2. Contrôle Qualité Contrôle Quantité
  3. Stockage, attente, en-cours
  4. Transport, manutention

Cette analyse est le plus souvent menée par le service Méthodes à l'aide d'une fiche d'analyse spécifique.

 

 

 

 

 

 

 

 

 

MURI MURA MUDA

Ces trois mots expriment trois nuances, trois formes de gaspillage et guident une bonne part des méthodes japonaises. On les appelle parfois les 3M.

 

 

 

Lectures complémentaires

lot de transfert et lot de production
tension des flux

 

 


Cette page vous est offerte par ©hristian HOHMANN - http://chohmann.free.fr/